mardi 31 juillet 2012

Triptyque

27.07

S’ouvre à nouveau
Le jour
Entre ardente poussière
Et ton front algide

Il ravive

Béante et cuisante la blessure d’où s’écoule
En flot noir ininterrompu l’épure de ta douleur

Si tu pouvais rester
Si tu pouvais
Retenir encore un peu
Demain
Au creux de tes paumes

Mais déjà il s’échappe
Comme alevins d’ombres
Glissant entre tes doigts

T’emmenant avec lui
Au gré
Des rivières d’émeraude


27.07+1

Tu traverses maintenant
La nuit
Les yeux grands ouverts

Tu connais la cartographie des étoiles
Tu sais
Sous leur noir manteau de velours
Leurs lueurs d’opale

Tu vas
Ballotté entre remous des méandres
Et courant paisible des canaux

Le chant des eaux lave tes peines
Dans la promesse des grandes étendues

Il n’est pas de répit
Pas encore
Dans les lits d’airain
Mais il s’en vient


27.07+2

En ton poing
Tu as étreint quelques fractions de secondes
Pendant que les étoiles
Dans leur ballet incessant
Laissaient place au jour

A leur retour tu les as saluées
Lançant vers le firmament
Tes bras mus par le désir d’elles

L’aube a déposé
Sur ton front brûlant
Un baiser

°

L’aurore embrase les volutes aériennes
De ton ciel d’été

L’amour est là qui te tient la main
Sa respiration calquée sur la tienne
Il recueille les mots que tu lui confies
Te glisse en échange quelques-uns des siens
À emporter

Aucun cataclysme en vue
Juste un pas
Ou deux

C’est tout ce qui te reste à parcourir
Tu sauras que tu as franchi le seuil
Lorsque tu sentiras sous tes pieds nus
Le sable encore gorgé de lune
Multitude de semences d’étoiles
Que tu fouleras de ton pas

Léger
Sans attente




mercredi 4 juillet 2012

microcosme

ils sont terre malléable ils cherchent la réminiscence d’un voyage inaugural l’eau vive des sources le souvenir du feu les formes naissantes sous lune rouge les ombres fraîches des soirs de printemps ils cherchent les fractions du temps pour les assembler en un collier de perles un pont bâti de nuit pour y glisser leurs lueurs ils attendent

tes doigts
tes mains

potier

ils attendent
blottis

dans l’air que tu respires lourd d’odeurs dans le son de la ville masquant le chant des oiseaux dans les gouttes semées dans le vent gris et froid envolant les pages du livre ils rêvent en ton sein de bleuets et de pavots des blés ondoyant au vent ils esquissent quelques mouvements bientôt tu ne pourras plus contenir

leur flot
leur rage

poète

ils s’assemblent
se rassemblent

tu entends la rumeur monter gronder leur appel que tu dois ignorer encore privé que tu es de tes mains que d’autres ont liées dans ton dos leur chant commence à s’élever tu sais que bientôt tu ne pourras plus résister tu devras céder la place toute la place le jour se levant ils jailliront te demanderont ton nom tu leur chuchoteras évanescent

le leur

dimanche 24 juin 2012

L'immense

Peut-on
Peut-on se remémorer la rencontre

Cet instant où le regard repliant ses ailes
Se pose
Cet instant où les vibrations emplissent le corps

Peut-on

Peut-on transcrire le frisson
Les jambes devenues trop faibles
La conviction qu’il faut s’asseoir et attendre
Attendre ce que désormais
On ne devra plus attendre

Attendre encore d’y voir encore
Car les yeux se refusent à l’évidence

Evidence d’encre sur papier
Evidence de ce qui prend forme
De ce qui naît qui n’existait pas
Pas encore

Les lettres vacillent
Mais on se dit que non tout de même
On ne peut vraiment pas défaillir
Pas maintenant ni ici

Les fleuves les rivières demandent
A sortir de leur lit
On essaie on essaie fort
De construire digues et renforts

Seulement voilà
Seulement c’est tout
On ne peut pas

Il n’y a plus rien ici
Ni digues ni renforts
Plus rien ici
Que les prénoms aimés
Que les peintures sur les murs
Plus rien car tout est là
Tout

Et tout était là depuis toujours
On le savait on le voyait

Mais c’étaient d’autres yeux que ceux-ci
C’était un autre cœur une autre vie

°
Le seul absent
C’est toi
Qui tiens ma main
Depuis toujours
°

Alors on se penche
Et on respire
Alors on s’éloigne
Et on revient
Et puis on pleure
Un peu
Et un peu plus
Peut-être
Parce que voilà
On n’y peut rien

On note seulement
Que le gardien se détourne
Pour nous laisser seuls

Seuls pour mesurer ici et maintenant
L’immense

Plus vaste qu’on avait pu l’imaginer
Plus vaste que l’infini d’un tracé
Plus vaste que tout ce que jamais
On ne pourra


(Pour Edmond Jabès)

mardi 12 juin 2012

Aux lueurs d'escarbilles

Soulevés de leur lit de fibres écrues
Les mots sont vecteurs d’images

Elles s’affichent en couleurs saturées
Viennent féconder le centre de mes iris embués

Pendant qu’au loin un milan royal déploie ses ailes
Et amorce sa spirale ascendante

J’ouvre grand la fenêtre
De la maison devenue presque silencieuse

J’entends les oiseaux sur le toit
Et le cliquetis de leurs griffes sur les tuiles

Je ne sais pas pourquoi
Je ne sais pas comment

Mais je nage à contre-courant
Toujours à contre-courant

Le feu pétillant lance ses flèches escarbilles
A la conquête de la nuit d'ébène

Je le sens arracher la chair de mes os
Sans eau sans eau pour une jarre de terre

Je vois des lettres comme des écailles s’assembler
Et unir mots rampants en phrases serpents

Ils cherchent le soleil feu du jour
Dans l’urgente nécessité d'y loger pour grandir et muer

Errant seule sur les remparts de ma raison en ruine
J’écoute encore la voix des chimères

Au souffle de feu


mardi 29 mai 2012

Dans un écho

Le bleu du ciel danse dans le plumage
D’un couple de pies venu fouler mon ombre

Sur mon visage le souffle de leurs ailes
Dans leur élan des branches jusqu’aux nuages

Je connais l’emplacement de leur nid
Mais c’est un navire que je vois poindre à l’horizon

Je gis dans le parfum des foins
Lovée dans un écho
Guettant le chant d’un oui
Porté par les fleuves





Eclatement

En couleurs encore distinctes
Par mes doigts sur le papier étirées
Par un mouvement de ma main
Aux yeux grands ouverts

Je ne sais si tu étais le rouge ou le bleu
Etais-tu peut-être
Le violet qui en naîtrait plus tard

Tu étais quoi qu’il en soit
Ouverture d’eau
Infinité tournoyante
Bordée de pétales éclatés d’amour

C’était l’annonce en moi
De la floraison de toi